En cas de renversement de vapeur, Sassou regrettera, à
jamais, de n’avoir pas entendu les cris venus de la terre entière et en voudra,
jusqu’à la fin de ses jours, à tous ses courtisans qui lui ont monté le
bourrichon, au lieu de négocier la sortie. Parce qu’il est candidat, Jean-Marie
Michel Mokoko, sorti fraichement des allées du pouvoir, se voit infliger des
humiliants kwenda-vutuka (va-et-vient, en congolais) auprès d’un
procureur quelque peu éméché mais surtout au service du pouvoir.
Ces kwenda-vutuka sont les signes manifestes d’une
hésitation quant au prochain musellement de Mokoko. Ce Général, très populaire,
pourrait finir en prison, ou être le point de départ d’une révolte populaire
potentielle. Dans les geôles du pouvoir de Brazzaville, croupit arbitrairement,
entre autres, Modeste Boukadia pour ses opinions séparatistes dénonçant, non
sans arguments, le caractère ethno sélectif de la violence du pouvoir.
Les congolais qui ont tant soif de changement, voient
en ce général, celui qui peut défier Sassou et son clan. Des tréfonds de son
impopularité, ce dernier promet une « victoire » dès le premier. Mais
en dépit des règles biaisées de ce simulacre d’élections, Mokoko qui s’est
lancé dans le démantèlement du pouvoir, conteste tant la crédibilité des
structures chargées de superviser ces pseudos scrutins que la victoire que le
pouvoir entend voler au peuple.
A travers ces meetings drainant des foules compactes à
chaque fois, Jean-Marie Michel Mokoko (J3M) endosse les habits de leader
capable de déposer le régime de Brazzaville. L’invincibilité de Sassou tient
d’une fausse légende alimentée par la peur. Celle-ci semble gagner le pouvoir
de plus en plus fébrile.
Politiquement, Sassou relève du passé. Sa place
n’est plus, selon la jeunesse désabusée, à la tête du pays mais devant les
juges nationaux et internationaux afin de décrypter les différentes énigmes qui
jalonnent son règne. Sa mauvaise lecture du paysage politique hostile à son
régime, composé essentiellement des personnes l’ayant côtoyé, le rend davantage
vulnérable. Seule sa puissance de feu qu’il a étalée dernièrement à
Pointe-Noire peut le maintenir en apnée. Mais la population ponténégrine qui
est un sérieux baromètre, vient de lui répondre par une marée humaine au méga
meeting du général Jean-Marie Mokoko ce samedi 12 mars 2016. Ce dernier se veut
être le candidat du peuple.
Au-delà de l’immensité de ses richesses réelles, le
Congo de Sassou est classé au rang de pays pauvres tant les populations broient
la misère. Enfermée dans l’oisiveté, la jeunesse tente de déchiffrer le
mystère de son unique chemin ; celui de son avenir. Il convient de noter
qu’une impressionnante frange de celle-ci erre à longueur de journée, sans
compter le cortège des enfants de rue.
Avec un taux de chômage qui explose et une dette
colossale, la jeunesse congolaise exige de nouvelles mœurs politiques arrimées
à la modernité. Agrippés aux mamelles de l’état, le régime de Brazzaville qui
n’a jamais cessé de confondre le trésor public avec ses poches privées a sorti
ses griffes. L’intimidation et la violence.
Lorsque l’on sait comment se sont constituées les
fortunes, la question de biens mal acquis constitue une donnée de taille. Porté
de 12 millions à 25 millions, la caution de participation à ce folklore
électoral est d’un ridicule sans nom. Ne pouvaient s’inscrire à ces pseudos
scrutins que ceux qui ont pu, à un moment ou un autre, ouvrir les vannes du
trésor public. Tout le monde le sait. Ces élections ne sont qu’une mascarade
visant simplement la reconduction des potentats incarnant les dictatures les
plus féroces. Alors, l’IDC-FROCAD (plate-forme de l’opposition officielle) et
Mokoko se doivent d’absoudre leur frisottement avec le pouvoir de Brazzaville
en mettant fin à ce régime.
Dans le cas du Congo-Brazzaville où les contorsions
sont scrutées par les voisins pour un éventuel exercice d’imitation, le
pouvoir, vieux en diable (un demi-siècle bientôt), ne peut convaincre ses
concitoyens d’être l’exact représentant de l’avenir ni même porteur des
aspirations des populations essorées à merci.
Infoutu de constater l’imminence d’un mouvement
insurrectionnel, enivré par le pouvoir qu’il ne daigne se sevrer, du haut de
ses 72 ans et de ses 32 ans de règne, l’homme qui roule les mécaniques au Congo
avec ses chars d’assaut et ses hélicoptères en guise de parade électorale, se
veut omnipotent et omniscient. Sassou promet un coup ko à tous ceux qui
veulent lui faire de l’ombre.
Depuis toujours, sa foi en la force de sa poudre et de
sa soldatesque qu’il ne cesse de renforcer par des contingents étrangers, n’a
subi aucune n’altération. Le coup ko qu’il promet, peut aller jusqu’à
marcher à nouveau sur les cadavres de ses concitoyens afin d’assouvir sa soif
du « goût du sang » mais surtout pour s’assurer une protection contre
l’étau judiciaire.
Sur les starting-blocks donc, neuf candidats
participent au sprint organisé par le pouvoir dictatorial congolais au terme
d’une sélection sous pression ce 20 mars 2016. Une duperie visant la simple
conservation du pouvoir orchestrée par le pouvoir qui, sans opérer une mue à
défaut d’une mutation, fait basculer le pays en dictature des plus sclérosées et
rétrogrades.
Une telle mascarade serait sans intérêt tant
l’opposition avait été laminée depuis des lustres au point de croire à
l’inexistence définitive de celle-ci. La curiosité qui interpelle surgit dès
lors que l’on se retrouve en présence d’une opposition officielle composée
essentiellement des acteurs venus des rangs du pouvoir, donc le connaissant. Ce
sont donc des « sachant ».
Sont-ils des simples inconscients jouant les
sous-marins et servant de caution « démocratique » ou des réels
chevaux blancs habités par l’esprit patriotique et rongés suffisamment par
des regrets d’avoir servi une monstruosité ? C’est en étant déterminés et
percutants qu’ils vont lever les doutes dans ces foules qui, à leur tour, vont
les porter.
Abraham Avellan WASSIAMA
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